Automédication: Une pratique dangereuse mais prisée au Cameroun
Ils sont
nombreux ces camerounais qui face à la maladie, ont recours à des médicaments
sans ordonnance, ni prescription du médecin.
Maux
de tête et de gorge, fièvre, toux, douleurs corporelles ou digestives et bien
d’autres.Quelque que soit la nature du mal, soigner les maux du quotidien à
l’aide de médicaments est devenu un réflexe pour une grande majorité de
camerounais.« J’ai une petite boîte
à pharmacie chez moi. A l’intérieur, j’ai du paracétamol, de la quinine,
l’Efferalgan pour d’éventuels maux de tête et de dent entre autres. De
l’alcool, le coton le sparadrap y sont également. Cela m’aide beaucoup quand
l’enfant commence à chauffer ou lorsque moi-même je suis malade», confie Madeleine
Nomo. Une pratique récurrente pour certains qui ne voient pas la nécessité de consulter
pour «un simple mal de dos, une migraine
et des maux d’estomac».
Pour
Frédéric, étudiant à l’université de Yaoundé 1, il faut se soigner seul dans les
cas les plus bénins. «D’autant plus que
le manque d’argent ne permet pas à tous d’avoir accès aux soins médicaux des hôpitaux»,
ajoute-t-il. Un avis partagé par Idriss, vendeur d’orange. D’après ce dernier,
l’automédication l’aide dans la mesure où il n’a pas de moyens financiers pour
aller à l’hôpital. «Nous avons un bon
vendeur de médicament dans notre quartier. Avant d’acheter son médicament, il
nous demande où l’on a mal et nous vends des médicaments en fonction du mal. Et
je n’ai pas besoin de payer la consultation, ni patienter des heures comme cela
se fait à l’hôpital», explique-t-il.
Quand il lui est demandé le niveau de formation du vendeur de médicament,
pour Idriss cela n’a pas d’importance. «Il a appris sur le tas. Et de toutes
les façons, ces comprimés n’ont jamais été dangereux puisqu’il exerce depuis 15
ans et personne ne s’est plaint», défend-il.
Les dangers de
la pratique
Pour
Nathalie D. qui a eu à faire face aux risques de la pratique, cela est
traumatisant et n’incite pas à recommencer. «Je souffre régulièrement du mal d’estomac. Un jour ma cousine appelle à
la maison et on lui dit que je suis alité à cause de ce mal. Elle nous fait part
du fait que son mari souffre du même mal et nous communique le nom du
médicament qui calme son mal. On va l’acheter en pharmacie et je le prends.
Quelques minutes plus tard, ma langue commence à sortir de la bouche et je
n’arrive plus à bien parler. On m’amène à l’hôpital de Biyem-Assi et le
personnel soignant exige qu’on vienne avec le comprimé que j’ai pris. Après
cela, il constate que je suis en train de faire une réaction allergique à ce
médicament. De là, je reçois deux injections d’allergènes», raconte-t-elle.
Selon
Dr Vandi Deli, chef de service de l’homologation de la direction de la
pharmacie, du médicament et des laboratoires, l’automédication peut entraîner
des complications sévères, dû notamment à la méconnaissance des composants du
médicament, la date de péremption, des erreurs de posologie et la
méconnaissance des effets secondaires.
Dr Vandi Deli
«Le circuit normal du malade, c’est de passer par un
médecin… »
Le chef de
service de l’homologation de la direction de la pharmacie, du médicament et des
laboratoires, explique les risques liés à la pratique de l’automédication.
Quels sont les
chiffres par rapport à la pratique de l’automédication ?
L’automédication
est une pratique courante. Mais les chiffres en elles même ne sont pas
disponibles. Pour avoir les chiffres, il faut qu’il y ait eu des études
concernant cela. La pratique est tout de même très courante par le fait que le
médicament n’est pas dans son circuit légal habituel. Le médicament est partout
dans la rue, c’est pour cela que le phénomène de l’automédication est assez
courant.
Est-ce que la
pratique mérite-t-elle d’être ?
Non,
parler d’automédication, c’est parler des mauvaises pratiques. Cela ne devrait
pas être. On ne devrait pas avoir recours à de l’automédication. Le circuit normal
du malade, c’est de passer par un médecin qui fait son diagnostic, qui prescrit
le médicament, et le médicament est délivré par les soins d’un pharmacien, soit
dans une pharmacie hospitalière, soit dans une officine de pharmacie. Et cela doit
se fait sous la supervision d’un pharmacien.Tout autre comportement qui sort un
peu de ce cadre-là, est de l’automédication.
Quels sont les
risques encourus ?
Les
risques sont énormes. On va globalement dire que c’est les risques d’erreurs.
On peut utiliser un produit qu’on ne devrait pas. Ça c’est l’erreur sur le
médicament. Mais maintenant, l’erreur sur le médicament peut entrainer d’autres
catastrophes.Il y a des effets de morbidités d’organes qui peuvent découler des
situations de désordres créées soit au niveau de l’œil, du rein, du poumon etc.
Il faut éviter d’utiliser un médicament quand ce n’est pas nécessaire. Il peut
également avoir mort d’homme, c’est-à-dire par exemple quand je ne devrais pas
utiliser un anticalcique, médicament qu’on utilise dans le cadre cardiaque.
Cela peut m’entrainer un problème au cœur et je peux en mourir.
Donc
l’automédication, n’est pas une bonne chose et les erreurs dus à cela
c’est-à-dire les conséquences peuvent être dramatique allant d’une simple
infection à la mort.
Les gens ont
l’habitude de consommer du paracétamol, de la quinine et des Efferalgan, en cas
de maux de tête, n’est pas dangereux ?
Ce
n’est pas parce qu’on a mal à la tête qu’on doit prendre du paracétamol. Le mal
de tête peut avoir une autre origine. Cela peut être parce que quelqu’un est
fâché, ou qu’il a un problème à l’œil qui entraine des maux de tête. Donc on
peut se retrouver à consommer le paracétamol toute la vie alors qu’il suffisait
simplement d’aller consulter.
L’automédication
vient résoudre le signe qui est là. C’est-à-dire j’ai mal à la tête je prends
le paracétamol. Or ce n’est pas cela. La démarche diagnostique, répond à la
question, pourquoi j’ai à la tête ? De là, il n’y a que le professionnel
qui peut savoir. Or quand vous aller dans la rue, on quand vous pensez que vous
pouvez résoudre votre mal, vous pouvez vous retrouver à consommer énormément de
médicament sans trouver de solutions. Et plutôt causer les problèmes à votre
organisme. Donc c’est pas de bonne pratique.
Qu’est-ce qui
entre dans la normalité?
Pour
regrouper, on va dire qu’il y a deux types de médicaments. Il y a certains
médicaments qu’on appelle OTC (over-the-counter) et d’autres qu’on ne devrait
délivrer que sur présentation d’une ordonnance. OTC c’est-à dire des
médicaments qu’on peut délivrer après un petit dialogue avec le pharmacien.
Quel que soit le cas, aucun des deux types de médicaments ne peut être délivré
sans la présence du pharmacien dans une officine. Pour le cas des médicaments
qui doivent être délivré sur présentation de l’ordonnance, le pharmacien doit
vérifier la conformité de l’ordonnance avant de procéder à la délivrance du
médicament. Pour les médicaments conseils, le pharmacien doit s’assurer de
l’utilisation de ces médicaments. Il ne s’agit pas non plus d’une délivrance
désordonnée. Donc on pose effectivement des questions pour se rassurer de
l’utilisation de ce produit, la raison pour laquelle on veut l’utiliser, on se
rassure de l’âge du patient, de son terrain, c’est-à-dire est qu’il a d’autres
troubles éventuels. Ce n’est que par rapport à toutes ces vérifications qu’on
peut délivrer un médicament conseil.
Commentaires
Enregistrer un commentaire